Peut-on faire annuler ou réduire la Caution personnelle du dirigeant en entreprise ?

Oui dans certains cas ! Quand une société ferme ses portes, deux scénarios sont fréquents :

  • soit par Transmission Universelle de Patrimoine (TUP), lorsque les actifs et passifs sont transférés à une société mère,
  • soit par liquidation judiciaire, quand l’entreprise ne peut plus faire face à ses dettes.

 

Dans ces cas, beaucoup de dirigeants découvrent que la caution personnelle qu’ils avaient donnée pour obtenir un prêt bancaire ou garantir un bail reste active.

La question est alors cruciale : le dirigeant doit-il encore payer de sa poche, alors même que la société a disparu ? La réponse n’est pas toujours simple. Car si la caution n’est pas effacée automatiquement, il existe des moyens juridiques puissants pour la contester, l’annuler ou la réduire.

Qu’est-ce qu’une caution personnelle de dirigeant ?

Une caution est un engagement écrit par lequel une personne (ici, le dirigeant) promet de payer les dettes de la société si celle-ci ne peut pas le faire.

En pratique, les banques, les fournisseurs ou encore les bailleurs exigent souvent cette garantie avant d’accorder un crédit ou un contrat.


👉 C’est une sûreté “personnelle” : elle engage le patrimoine propre du dirigeant, parfois jusqu’à sa résidence principale ou ses revenus futurs.

C’est pourquoi, au moment de la fermeture d’une société, la question de la caution est centrale.

Fermeture d’entreprise : TUP ou liquidation, quelle différence pour la caution ?

  • La TUP : lorsqu’une société est absorbée par une autre (généralement sa maison-mère), tous les actifs et passifs sont transférés.

    → Ici, la caution du dirigeant subsiste tant que la dette existe. Mais si la société absorbante rembourse intégralement le prêt, la caution s’éteint.
    En Revanche dans le cas où l’absorbante ne rembourse pas le prêt vous allez naturellement être appelé en tant que caution et c’est là que nous allons réfléchir sur la limite du pouvoir de la banque.
  • La liquidation judiciaire : l’entreprise est dissoute, son patrimoine liquidé et les dettes inscrites au passif.
    → Dans ce cas, la caution n’est pas effacée par la liquidation. Le créancier (ex : la banque) peut directement se retourner contre le dirigeant.

Contestation de la caution

Même après une TUP ou une liquidation judiciaire, la caution personnelle du dirigeant reste valable.


👉 Mais elle peut être annulée si l’engagement était disproportionné, si la banque a manqué à ses obligations ou si le formalisme n’a pas été respecté.

Réduction de l’engagement

La caution peut aussi être réduite si la banque n’a pas informé chaque année le dirigeant de l’état de la dette, ou si la créance principale a été rejetée en liquidation.


👉 Dans certains cas, la prescription ou l’extinction de la dette libère totalement le dirigeant.

👉 En résumé : ni la TUP ni la liquidation ne suffisent à annuler une caution. Il faut chercher d’autres leviers.

 

Dans quels cas peut-on annuler ou réduire une caution personnelle ?

 

Bonne nouvelle : le droit offre plusieurs moyens de défense aux dirigeants poursuivis en tant que caution. Voici les principaux :

 

  1. La disproportion manifeste de l’engagement

 

La loi protège la caution contre des engagements “hors de proportion” avec ses revenus et son patrimoine au moment de la signature.

 

➡️ Exemple : un dirigeant qui gagne 2 000 € par mois ne devrait pas garantir un prêt de 500 000 €. Si la caution est jugée disproportionnée, elle peut être annulée.

 

  1. Le manquement de la banque à ses devoirs
  • Devoir d’information annuelle : la banque doit informer chaque année la caution sur l’état de la dette. Si elle ne le fait pas, certaines sommes réclamées peuvent être réduites.
  • Devoir de mise en garde : si le dirigeant n’est pas considéré comme un “emprunteur averti”, la banque doit l’alerter sur les risques. En cas de manquement, la caution peut être annulée.
  1. La pression ou le vice du consentement

 

Un cautionnement signé sous la contrainte, par exemple parce qu’une banque menace de couper les financements indispensables, peut être annulé pour “violence morale”.


👉 La jurisprudence a déjà sanctionné des banques ayant abusé de leur position pour forcer un dirigeant à signer.

 

  1. Les vices de forme et clauses abusives

Pendant longtemps, la loi imposait des mentions manuscrites précises (“en toutes lettres”) que la caution devait recopier.

  • L’absence ou la mauvaise formulation de ces mentions pouvait entraîner la nullité de la caution.
  • Aujourd’hui, le formalisme a été assoupli, mais il reste possible de contester un acte illisible, incomplet ou abusif.
  1. La contestation de la créance principale

 

Dans une liquidation judiciaire, chaque créancier doit déclarer sa créance au passif dans un délai précis.

  • Si la banque oublie, ou si sa déclaration est rejetée, la dette peut disparaître.
  • Or, sans dette principale valable, la caution ne peut pas être poursuivie.
  1. La prescription de l’action contre la caution

 

Le créancier dispose d’un délai limité pour agir contre la caution (généralement 5 ans).
👉 Si la banque tarde trop, le dirigeant peut opposer la prescription.

  1. L’extinction de la dette principale

 

La règle est simple : si la dette principale est éteinte (par paiement, remise de dette, compensation, etc.), la caution est automatiquement libérée.

 

Ce que dit la jurisprudence

Les tribunaux ont souvent donné raison aux dirigeants lorsqu’ils démontrent :

    • que leur engagement était manifestement disproportionné (Cour de cassation, com. 22 juin 2010),
  • que la banque a exercé une pression excessive (violence morale),
  • ou encore que le formalisme n’a pas été respecté.

 

Ces décisions rappellent que le cautionnement n’est pas une fatalité et que chaque dossier mérite d’être analysé dans le détail.

 

Conseils pratiques pour les dirigeants en difficulté

  1. Relisez attentivement votre acte de caution : mention manuscrite, montant, durée, clauses.
  2. Vérifiez vos revenus et patrimoine au moment de la signature : si c’était disproportionné, vous avez un argument fort.
  3. Demandez les informations annuelles que la banque devait vous fournir. Leur absence peut jouer en votre faveur.
  4. Surveillez la déclaration de créance en cas de liquidation judiciaire : si elle est rejetée, votre caution tombe avec.
  5. Consultez nous rapidement : beaucoup de moyens de défense se jouent sur des délais très courts.