Les pièges à éviter dans une TUP transfrontalière, dangers, risques et conditions légales pour une TUP sereine.

La Transmission Universelle de Patrimoine (TUP) est un mécanisme puissant permettant à une société de dissoudre son existence juridique tout en transférant l’intégralité de son patrimoine (actif et passif) à une autre entité absorbante. Si elle peut être une alternative stratégique à la liquidation judiciaire, elle ne doit en aucun cas être utilisée pour contourner les droits des créanciers ou les obligations légales. Cet article explore en profondeur les étapes, obligations et précautions à prendre pour garantir la légalité et la réussite d’une TUP transfrontalière et vous explique les piéges à éviter.

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  1. Réciprocité des dettes dans un pays membre des conventions européennes

La première condition essentielle pour garantir la validité d’une TUP transfrontalière est de choisir un pays d’accueil respectant les conventions européennes en matière de reconnaissance des créances.

En Europe, grâce aux conventions établies entre les pays membres, les créances validées dans un État sont automatiquement reconnues et exécutoires dans un autre État membre sans nécessiter de procédure supplémentaire. Par exemple, un fournisseur polonais ayant une créance validée par un tribunal polonais peut la faire exécuter en France sans qu’un nouveau jugement ne soit nécessaire. Cette réciprocité offre une garantie précieuse aux créanciers.

Cependant, en dehors de l’Union Européenne, cette reconnaissance n’existe pas. Prenons l’exemple des Émirats arabes unis, du Maroc ou des États-Unis : un créancier souhaitant recouvrer une créance devra entamer des démarches longues et coûteuses dans le pays d’accueil de la société absorbante. Ces démarches nécessitent souvent des validations locales, augmentant le risque d’échec ou d’impossibilité de recouvrement.

👉 Pourquoi cela pose problème ?
Un créancier pourrait interpréter le transfert d’une société vers un pays non européen comme une tentative délibérée d’empêcher le recouvrement de sa créance. Cela pourrait donner lieu à une action paulienne, qui vise à annuler toute opération portant atteinte aux droits des créanciers. L’argument principal serait qu’en choisissant un pays sans convention de reconnaissance des dettes, le cédant a agi de mauvaise foi en rendant de facto la créance irréalisable.

👉 Clé à retenir :
Pour garantir la validité d’une TUP transfrontalière, il est impératif de choisir un pays d’accueil où les conventions européennes de reconnaissance des créances s’appliquent. Toute tentative de contourner ces principes expose la TUP à une annulation pour manquement grave.

 

  1. Un capital social souscrit et libéré qui couvre le passif absorbé

La seconde condition indispensable concerne la solidité financière de la société absorbante. Elle doit être en mesure de reprendre le passif de la société absorbée sans compromettre sa propre viabilité.

Pour cela, le capital social de la société absorbante doit être non seulement souscrit mais aussi entièrement libéré, c’est-à-dire réellement disponible. Ce capital doit également être suffisant pour couvrir au moins deux fois le montant du passif absorbé, sauf si la société peut démontrer qu’elle dispose de fonds propres significatifs.

Prenons un exemple : une société absorbée avec un passif de 300 000 euros est transférée à une société absorbante avec un capital social de 1 000 euros. Cette situation serait considérée comme fictive. Elle pourrait conduire à une annulation de la TUP pour défaut de sincérité.

👉 Clé à retenir : Le capital social doit refléter la capacité réelle de la société absorbante à honorer les engagements transférés. Toute insuffisance ou absence de libération expose l’opération à des contestations judiciaires.

 

  1. Faire l’inventaire du passif protège le cédant

La troisième condition fondamentale est de réaliser un inventaire exhaustif du passif avant la TUP.

Contrairement à une liquidation, une TUP ne nécessite ni bilan de liquidation ni bilan de situation grâce à l’article 1844-5 du Code civil. Cependant, il est impératif d’établir un état des comptes détaillé, incluant :

  1. Les passifs avérés (dettes clairement identifiées).
  2. Les passifs incertains (litiges ou obligations potentielles).
  3. Les passifs à venir (engagements futurs).

Cet état constitue une photographie complète de l’entreprise et protège le cédant contre des responsabilités futures. Si un créancier découvre une dette non déclarée après la TUP, il pourrait contester l’opération ou poursuivre le cédant directement.

👉 Clé à retenir : L’établissement d’un état intermédiaire des comptes, bien que non obligatoire, est crucial pour garantir la sécurité juridique de l’opération et éviter tout contentieux.

 

  1. Déclaration du passif dans le pays de la société absorbante

La quatrième condition repose sur la transparence et la déclaration officielle du passif dans le pays de la société absorbante, ce qui est une étape cruciale pour assurer la légalité et la crédibilité de la TUP.

La Transmission Universelle de Patrimoine implique un transfert complet et irrévocable de l’ensemble des actifs et passifs de la société absorbée vers la société absorbante. Cela signifie que chaque élément du passif doit être identifié, documenté et formellement repris par la société absorbante dans le cadre de l’opération.

👉 Pourquoi cette transparence est essentielle :
La déclaration du passif protège les droits des créanciers et renforce la légitimité de la TUP. En cas de manquement ou d’omission, un créancier pourrait contester l’opération et demander son annulation en invoquant un défaut de transfert du passif.

👉 Les bonnes pratiques à adopter :

  1. Réaliser un audit financier complet avant la TUP pour identifier l’intégralité des passifs.
  2. S’assurer que chaque créance, même incertaine ou à venir, est incluse dans les documents juridiques.
  3. Publier dans des délais raisonnables tous les documents nécessaires à la traçabilité et à la transparence de l’opération.

 

  1. Gestion du contentieux : La société absorbée continue à vivre au sein de l’absorbante

La cinquième condition à respecter est la gestion rigoureuse des contentieux post-TUP.

Bien que dissoute juridiquement, la société absorbée continue de vivre à travers la société absorbante. Cela implique :

  • Une accessibilité constante aux créanciers (courrier, email).
  • La mise en place d’un contrat de suivi postal pour réacheminer les courriers adressés à l’ancienne adresse de la société absorbée.
  • Une réponse systématique à toutes les sollicitations des créanciers.

👉 Clé à retenir : La gestion des contentieux est un critère clé pour éviter toute remise en cause de l’opération.

 

  1. Une durée de vie minimale pour la société absorbante

La sixième condition concerne la durée de vie de la société absorbante après la TUP.

Dissoudre rapidement cette société après l’opération peut être perçu comme une tentative de fraude. Cela expose les responsables à des accusations d’intention malveillante et pourrait entraîner l’annulation de la TUP.

Il est recommandé que la société absorbante reste active pendant au moins 5 ans après la TUP, avec une traçabilité claire de ses activités et une gestion rigoureuse de la correspondance.

 

À retenir :

Une Transmission Universelle de Patrimoine (TUP) transfrontalière ne se limite pas à une formalité administrative. Elle implique des étapes cruciales :

 

  • Choisir un pays garantissant la reconnaissance des dettes pour protéger les créanciers.
  • S’assurer que le capital social de la société absorbante soit suffisant et entièrement libéré.
  • Réaliser un inventaire précis du passif pour éviter tout litige futur.
  • Publier et intégrer toutes les informations financières dans le bilan de la société absorbante.
  • Maintenir la société absorbante active pour répondre aux éventuels contentieux et garantir la continuité des obligations.

 

Une TUP bien préparée est la clé pour assurer une transition légale et sans risques.